Feutre sur papier, 2019
D’abord, c’est une série de 9 dessins au feutre qui vient se mêler, se démêler. Tantôts serrés, bandés ou lâches. Entre symbole phallique et symbole féminin, mi-téton, mi-pénis, mi-intestin. Un peu gênant, un peu compliqué. Les nœuds sont en mouvement. Dans le dessin, le volume est donné par accumulation de lignes. Du dessin l’envie de volume a donné naissance à une sculpture-assise de 5 mètres de long en tissu rembourré. Un long tube de peau qui relie deux mamelons. Un objet à expérimenter, à nouer, et dénouer. Un symbole de vie, difficile à manipuler, lourd, imposant. Un objet avec lequel on peut faire corps. Chaque mamelon est rembourré avec du riz pour lui donner du poids et ainsi lui donner encore plus de réalité.
Delphine Huguet dévoile un univers absurde dans lequel des formes du corps et du quotidien s’entremêlent pour créer de nouveaux objets. Le textile ici est utilisé pour sa similarité avec la peau, douceur, couleur, texture et sa facilité de mise en forme. Tantôt objet maternel et phallique dans lequel on peut se lover ou objet usuel du quotidien dysfonctionnel, le corps est utilisé comme trame de fond d’objets qui poussent à s’interroger ou rire.
Delphine Huguet est une artiste transdisciplinaire qui s’interroge sur les relations interpersonnelles, les codes sociaux, la féminité, le corps. Durant 15 ans, à travers des installations comestibles et des performances décalées et parfois absurdes, elle a créé des espaces de mise en lien dans une quête ininterrompue de rencontre avec les publics. La nourriture comme une excuse à la rencontre. Après une pause réflexive de deux ans, c’est avec un nouveau souffle qu’elle se lance dans une recherche intimiste sur son rapport au monde en tant que femme.
Dans cette série, à travers le dessin et la couture, deux médiums pauvres de l’art contemporain, elle explore cette relation. Pour elle, avant même la rencontre culinaire, le corps est le premier point à la rencontre de l’autre. Le corps, source de plaisir et de souffrance, objet, vecteur d’ouverture, d’opportunités ou d’exclusions. Comment dépasser ce corps ? Comment ce corps transforme t-il notre rapport au monde ? Comment fait-on corps avec ce corps non choisi ?